Tribune
Pécher par excès de confiance
von Gilbert Casasus
| Juli 2021
Par choix idéologique, le Conseil fédéral a mis fin à l’accord-cadre. Faute d’explications et d’arguments convaincants, on est en droit de s’interroger sur une décision qui ébranle la politique européenne de la Suisse.
Drôle d’état dans lequel est la politique étrangère suisse ! Reconnue internationalement, elle est à la hauteur de sa réputation pour son action multilatérale, mais pointée du doigt pour son indécision européenne. Exemplaire lorsqu’elle se met au service des autres, elle perd de sa splendeur dès que le dossier européen se présente à elle. Désarçonnée, elle hésite, ne s’en prend qu’à la partie adverse, n’écoute qu’un seul son de cloche, le sien, et ne respecte guère ses interlocuteurs. Ne voulant en faire qu’à sa tête, elle a la tête ailleurs, là où elle ne devrait pas se trouver, en lieu et place de l’endroit où elle devrait être.
Pourtant, les négociateurs suisses de l’accord-cadre avaient toute leur tête. Ce qu’ils ont obtenu de la Commission européenne était remarquable. Opiniâtres, fins limiers du jeu du dit et du non-dit, leur savoir-faire les a grandement aidés dans leur mission. Acteurs chevronnés et parfaitement conscients des marges de manœuvre dont ils disposaient, ils avaient atteint leur objectif, sans pour autant dépasser la ligne jaune qu’ils ne pouvaient pas franchir. Bref, ils ont fait honneur au Conseil fédéral, avant que celui-ci ne leur manifeste un manque de gratitude des plus méprisants.
Pas l’échec des diplomates
L’échec de l’accord cadre n’est pas l’échec de la diplomatie et des diplomates. C’est celui de la politique étrangère et européenne du gouvernement suisse. Aujourd’hui dans l’impasse, celui-ci cherche une issue de secours qu’il n’avait pas envisagée. Toujours prisonnier de son propre mode de pensée, il se réfugie dans des solutions qu’il est le seul à concevoir. Au nom de sa propre souveraineté nationale, il répudie celle de l’Union européenne et méprise, avec naïveté ou désinvolture, le principe de l’unanimité des vingt-sept pays qui la composent. Sur la défensive, la Suisse tente alors de diviser les États membres, faisant fi des règles statutaires qui les unissent. Le procédé n’est pas neuf, quoique voué à l’échec. En effet, très peu de gouvernements européens sont disposés à sacrifier le principe de la libre circulation des personnes au sein de l’espace communautaire.
N’imaginant aucun autre système démocratique que le sien, la Suisse a péché par excès de confiance. Préconisant à tout va la démocratie directe, elle fut incapable de l’appliquer à elle-même pour l’accord-cadre. Contrairement au déroulement de nombreux référendums qui, à l’exemple de ceux organisés lors du projet constitutionnel en 2005, ont jalonné l’histoire de l’intégration européenne, la Confédération n’a pas été en mesure d’y recourir. Officiellement l’UE ne lui en fera pas grief, même si quelques sourires amusés ne manqueront pas de rappeler aux Suisses que leur amour pour le vote populaire vient d’en prendre pour son grade.
Un déni d’appartenir à l’Europe
Le refus de la citoyenneté européenne devrait, en revanche, donner lieu à des réactions beaucoup plus agacées. Au-delà du contenu réglementaire et juridique de sa directive, il sera certainement perçu comme un déni suisse d’appartenir à l’Europe. Cette attitude est d’autant plus affligeante que tous les Suisses sont des Européens, et « quand même pas des Asiatiques », comme aimait à le rappeler naguère avec un brin d’ironie le regretté ambassadeur Luzius Wasescha ! Elle reflète aussi un sentiment diffus de repli sur soi, d’allégeance à « la mentalité du réduit » dans laquelle se vautre une Suisse qui, au nom de son indépendance, oublie qu’elle a impérativement besoin de l’Europe et notamment de ses voisins les plus proches.
À n’avoir voulu jeter la première pierre qu’à ses premiers négociateurs, à la Commission de Bruxelles et à l’ensemble de l’UE, le Conseil fédéral s’est décrédibilisé sur le plan extérieur. De même il n’a guère brillé en politique intérieure. Dépouillant en partie le Département fédéral des affaires étrangères de son principal dossier, il suscite une certaine méfiance partagée jusque dans les arcanes du Palais fédéral. Par préférence idéologique, il a fait son choix. À lui désormais de l’assumer en toute conscience et d’assurer son service après-vente dont les explications et les arguments, entendus ici et là, paraissent d’ores et déjà tout aussi fébriles qu’erronés.
Drôle d’état dans lequel est la politique étrangère suisse ! Reconnue internationalement, elle est à la hauteur de sa réputation pour son action multilatérale, mais pointée du doigt pour son indécision européenne. Exemplaire lorsqu’elle se met au service des autres, elle perd de sa splendeur dès que le dossier européen se présente à elle. Désarçonnée, elle hésite, ne s’en prend qu’à la partie adverse, n’écoute qu’un seul son de cloche, le sien, et ne respecte guère ses interlocuteurs. Ne voulant en faire qu’à sa tête, elle a la tête ailleurs, là où elle ne devrait pas se trouver, en lieu et place de l’endroit où elle devrait être.
Pourtant, les négociateurs suisses de l’accord-cadre avaient toute leur tête. Ce qu’ils ont obtenu de la Commission européenne était remarquable. Opiniâtres, fins limiers du jeu du dit et du non-dit, leur savoir-faire les a grandement aidés dans leur mission. Acteurs chevronnés et parfaitement conscients des marges de manœuvre dont ils disposaient, ils avaient atteint leur objectif, sans pour autant dépasser la ligne jaune qu’ils ne pouvaient pas franchir. Bref, ils ont fait honneur au Conseil fédéral, avant que celui-ci ne leur manifeste un manque de gratitude des plus méprisants.
Pas l’échec des diplomates
L’échec de l’accord cadre n’est pas l’échec de la diplomatie et des diplomates. C’est celui de la politique étrangère et européenne du gouvernement suisse. Aujourd’hui dans l’impasse, celui-ci cherche une issue de secours qu’il n’avait pas envisagée. Toujours prisonnier de son propre mode de pensée, il se réfugie dans des solutions qu’il est le seul à concevoir. Au nom de sa propre souveraineté nationale, il répudie celle de l’Union européenne et méprise, avec naïveté ou désinvolture, le principe de l’unanimité des vingt-sept pays qui la composent. Sur la défensive, la Suisse tente alors de diviser les États membres, faisant fi des règles statutaires qui les unissent. Le procédé n’est pas neuf, quoique voué à l’échec. En effet, très peu de gouvernements européens sont disposés à sacrifier le principe de la libre circulation des personnes au sein de l’espace communautaire.
N’imaginant aucun autre système démocratique que le sien, la Suisse a péché par excès de confiance. Préconisant à tout va la démocratie directe, elle fut incapable de l’appliquer à elle-même pour l’accord-cadre. Contrairement au déroulement de nombreux référendums qui, à l’exemple de ceux organisés lors du projet constitutionnel en 2005, ont jalonné l’histoire de l’intégration européenne, la Confédération n’a pas été en mesure d’y recourir. Officiellement l’UE ne lui en fera pas grief, même si quelques sourires amusés ne manqueront pas de rappeler aux Suisses que leur amour pour le vote populaire vient d’en prendre pour son grade.
Un déni d’appartenir à l’Europe
Le refus de la citoyenneté européenne devrait, en revanche, donner lieu à des réactions beaucoup plus agacées. Au-delà du contenu réglementaire et juridique de sa directive, il sera certainement perçu comme un déni suisse d’appartenir à l’Europe. Cette attitude est d’autant plus affligeante que tous les Suisses sont des Européens, et « quand même pas des Asiatiques », comme aimait à le rappeler naguère avec un brin d’ironie le regretté ambassadeur Luzius Wasescha ! Elle reflète aussi un sentiment diffus de repli sur soi, d’allégeance à « la mentalité du réduit » dans laquelle se vautre une Suisse qui, au nom de son indépendance, oublie qu’elle a impérativement besoin de l’Europe et notamment de ses voisins les plus proches.
À n’avoir voulu jeter la première pierre qu’à ses premiers négociateurs, à la Commission de Bruxelles et à l’ensemble de l’UE, le Conseil fédéral s’est décrédibilisé sur le plan extérieur. De même il n’a guère brillé en politique intérieure. Dépouillant en partie le Département fédéral des affaires étrangères de son principal dossier, il suscite une certaine méfiance partagée jusque dans les arcanes du Palais fédéral. Par préférence idéologique, il a fait son choix. À lui désormais de l’assumer en toute conscience et d’assurer son service après-vente dont les explications et les arguments, entendus ici et là, paraissent d’ores et déjà tout aussi fébriles qu’erronés.
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